Le Mesnevi

Kýrýk Testi

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Mevlâna écrivit 71 ghazels (poèmes) pour Salahüddin, mort en 1262, et, dans ses lettres d'hommage, il le qualifiait de "Bajazet de son temps, Pôle des pôles". Après la mort de Salahüddin, Hüsamüddin Çelebi d'Ouroumiyé devint le calife et le compagnon de Mevlâna. Mais l'esprit de Mevlâna, après une période de calme, recommence à s'exciter et cette recrudescence d'agitation est à l'origine du Mesnevi. Prétextant que les oeuvres mystiques et didactiques, tels le Ahinâme et le Mantiku't Tayr du Cheikh Feridüddin Attar, jouissaient d'une grande faveur parmi les derviches, Hüsamüddin Çelebi prie son Cheikh d'écrire un Mesnevi qui devrait instruire ses adeptes sur les règles de l'ordre et sur les réalités mystiques. Sur quoi, Mevlâna sort des plis de son turban un papier sur lequel étaient écrits dix-huit vers en disant qu'il y avait déjà pensé; et sur cette base, ils commencent à écrire le Mesnevi. Mevlâna parlait et Hüsamüddin Çelebi écrivait les inspirations et les pensées de son Cheikh. Quand le premier volume fut achevé, la femme de Hüsamüddin mourut et les travaux de rédaction furent interrompus pendant deux ans. Plus tard et toujours avec l'aide de Hüsamüddin, MevIâna continua ce travail. Les six volumes du Mesnevi sont formés de 26 000 vers et sa rédaction prit 7 ou 8 ans. On ne connaît pas de façon précise la date du début ni celle de la fin de ce travail; mais dans le deuxième tome, la date de 1264 est donnée comme étant celle du commencement. Vers la fin du premier volume, il est fait mention expresse du règne des Abbassides à Bagdad pendant la rédaction du dit volume, ce qui indique que le premier volume devait être achevé en 1258.
Chef-d'oeuvre de la littérature islamique, le Mesnevi est une œuvre mystique, morale et didactique rédigée surtout pour les adeptes et les disciples. Comme principe de composition, il suit surtout le système des deux mystiques persans Attar et Senai (mort en 1131) qui consiste à exprimer idées, préceptes et opinions par une parabole particulière. Au cours du développement d'une histoire d'autres récits sont intercalés mais la première narration finit toujours par être complétée. Mevlâna n'est pas un formaliste: dans cette ceuvre, contrairement au Divan-ı Kebir, il a choisi l'écriture en vers uniquement pour sa valeur didactique.
Cette amitié ne rencontra pas, cette fois, d'opposition, et même, après la mort de MevIâna, le 17 décembre 1273, Hüsamüddin Çelebi accepta de devenir calife suivant le désir et sur l'insistance de Sultan Veled, le fils de Mevlâna.
La mort de Mevlâna, survenue à Konya après une courte maladie, fut l'un des événements les plus importants de l'époque. Des hommes de tous les pays, de toutes les classes et de toutes les religions, suivirent son cortège funèbre et veillèrent jour et nuit devant son tombeau. Les détails de cet événement sont décrit dans le Menakib d'Ahmed Eflaki: "En lui, les Chrétiens ont pleuré Jésus, les Juifs, Moïse ". Un prêtre exprima ainsi le besoin qu'on avait de lui: "Mevlâna est comme le pain, est-il un seul homme qui songe à s'en détourner?". Les religions et les sectes portent en elles-mêmes une force de séparation; en unissant, avec une plus grande force, toutes les religions et les sectes dans le creuset de l'amour, Mevlâna faisait revivre les âmes desséchées et mortes comme une véritable résurrection de l'âme humaine.
Dans le Fihi ma Fih qui est le recueil des paroles de Mevlâna préparé par son fils Sultan Veled ou par l'un de ses adeptes, nous trouvons exprimée l'idée mystique que se faisait Mevlâna de la mort: "Ne blâmez pas la maladie et la mort pour moi, car la mort est là pour dissimuler la vérité. Ce qui tue en réalité, c'est la grâce sans pareille de Dieu". La même ceuvre nous fait connaître sa conception de l'au-delà. Au sens religieux, celui-ci est un monde spirituel au-delà de ce monde qui ne le satisfait pas par ses plaisirs passagers, un monde qu'il aime et crée lui-même en luttant et où il trouvera la paix et la sérénité.
De sa première femme Gevher Hatun, Mevlâna eut deux fils: Sultan Bahaeddin Veled et Alaeddin Çelebi. De sa deuxième femme, Kena Hatun, que Mevlâna avait épousée après la mort de Gevher Hatun, sont nés Muraffuru'd-Din Alim Çelebi et Melik Hatun. De tous ces enfants, c'est Bahaeddin Veled (1226-1312) qui ressemblait le plus à son père; il avait été, élevé avec beaucoup de soins et c'est son grand-père Ulema Bahaeddin Veled qui lui avait donné son nom.
En 1284, après la mort de Hüsamüddin Çelebi, Sultan Veled fut nommé calife sur l'insistance des adeptes. Il occupa ce poste jusqu'à sa mort en 1312. Il écrivit plusieurs oeuvres et s'appliqua à systématiser les fondements de l'ordre des Mevlevi dont son père avait jeté les bases.
 
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