Que signifie le verset coranique Nulle contrainte en religion ! (2 : 256) ?

FaKiR

Meþveret Bþk.
Que signifie le verset coranique Nulle contrainte en religion ! (2 : 256) ?


bir_tatli_huzur_1257181825.jpg



La contrainte est contraire à l'esprit et au but de la religion, qui est essentiellement un appel aux êtres dotés d'un libre arbitre à affirmer l'existence de leur Créateur et à L'adorer. L'intention et la volonté sont les bases nécessaires de toutes les actions (y compris les actes d'adoration rituels), les attitudes et les pensées desquelles l'individu est religieusement responsable. Sans ces bases la responsabilité n'aurait aucun sens. En islam, les actions ne sont considérées religieusement acceptables que si elles sont faites avec une bonne intention. La contrainte contredit également le principe religieux et légal selon lequel « Les actions ne valent que par les intentions ».[17]

L'islam ne permet ni de forcer les musulmans à accomplir ses rites et obligations, ni de forcer les non-musulmans à accepter l'islam. Les non-musulmans vivant sous le règne islamique ont toujours droit à une totale liberté de croyance et de culte s'ils acceptent de reconnaître la souveraineté de l'État islamique. Cela est montré par leur paiement de la djizya (impôt par tête dit capitation) et du kharaj (impôt foncier). En contrepartie, l'État s'engage à protéger leurs vies, leurs biens et leurs droits religieux.[18]

Le mode de vie islamique ne peut pas être imposé ou maintenu par la force, car la foi lui est essentielle. Or la foi est une question de coeur et de conscience, les deux étant au-delà de la force. Donc, dans le sens absolu, la contrainte est impossible, car on ne peut croire qu'avec le coeur.

Depuis l'époque d'Adam, la religion n'a jamais forcé qui que ce soit à l'incroyance ou à dévier de la droiture. Or les forces de l'incroyance cherchent toujours à contraindre les croyants à s'éloigner de leur religion et de leur foi. Aucun croyant n'a essayé de contraindre un incroyant à devenir musulman, alors que les incroyants essaient continuellement de ramener les croyants vers l'incroyance.
D'aucuns demandent pourquoi certains versets du Coran rendent obligatoire le combat et le djihad, car cela semble autoriser la contrainte.

Le combat et le djihad physique furent ordonnés parce qu'à cette époque-là les incroyants combattaient les croyants afin d'exterminer leur religion. L'ordre de combattre a permis et établi un esprit qui reconnaît le droit à la liberté religieuse et l'étend à tous. En d'autres termes, l'islam comprend et applique le principe de nulle contrainte en religion. Pleins d'assurance, les musulmans comprenaient que dès que ce principe deviendrait une partie intégrante de l'esprit collectif, les gens reconnaîtraient la vérité de l'islam et l'embrasseraient de leur plein gré. C'est ce qui s'est produit dans tous les territoires sous le règne de l'islam et naturellement bien au-delà, comme en témoigne l'histoire.
Considérons cette question à partir d'un autre angle. L'ordre de faire la guerre contre l'incroyance est valable seulement dans certaines circonstances. Comme les civilisations suivent le même cycle de formation, en passant par la prospérité, le déclin puis l'effondrement, des circonstances identiques ou similaires sont vouées à se reproduire. La tolérance et le laisser-aller seront remplacés par la persécution, laquelle fait appel à la force pour rétablir la liberté religieuse. Parfois l'attitude exprimée par le verset : À vous votre religion, et à moi ma religion (109 : 6) s'avèrera plus appropriée.

La période actuelle appartient à cette dernière catégorie, où nous pratiquons le djihad à travers notre résolution, notre persévérance, notre patience ainsi que notre prédication dévouée et assidue. Et c'est de cette façon que nous devons enseigner et expliquer. Nous ne nous engageons pas dans la coercition, car cela n'avance à rien. L'égarement et la corruption des autres n'est ni notre but ni le motif de nos efforts. Nous ne provoquons, visons ou offensons personne. Nous essayons seulement de préserver notre chemin du salut face à l'égarement. Et nous tâchons d'appliquer la religion dans notre propre vie.

Le fait de ne pas appliquer un commandement coranique donné dans les circonstances actuelles ne signifie pas qu'il est désuet. Cela signifie plutôt que ce commandement ne peut être appliqué correctement que dans certaines circonstances. Nous savons que de telles circonstances se reproduiront, mais nous ne savons pas quand. En attendant, le principe fondamental du commandement du verset 2 : 256 demeure universellement valable et applicable : la persécution religieuse est chose détestable à toutes les époques et en tout lieu. Dans la loi et l'histoire de l'islam, ce principe s'est traduit par le fait que sous un régime islamique aucun nonmusulman ne peut être contraint à accepter la foi, et que toutes les personnes sont individuellement et collectivement libres de vivre leur croyance.

Même les savants non-musulmans de l'Occident, souvent hostiles à l'islam, reconnaissent que les juifs, les chrétiens et autres non-musulmans vivant sous une autorité islamique ont généralement joui d'une bien plus grande prospérité économique, de plus de dignité et de prestige, et eurent droit à plus de libertés que ceux qui vivaient sous un régime non-islamique – serait-ce celui de leurs propres coreligionnaires. Cela n'a guère changé dans le monde occidental jusqu'à ce qu'une sécularisation à tous crins diminue l'importance des croyances religieuses, des rites et de la solidarité. Au lieu de devenir légalement tolérants, les États intolérants devinrent légalement indifférents.

En un sens, la tolérance religieuse est une caractéristique sociopolitique particulière à l'islam, dérivée directement de la compréhension qu'ont les musulmans du Coran et de leur engagement envers son principe de Nulle contrainte en religion.
Actuellement, les constitutions politiques occidentales accordent généralement la liberté religieuse individuelle, par opposition à la liberté religieuse collective et communautaire. L'État islamique reconnaît la pertinence et l'importance de la communauté pour la pratique et la continuation des croyances et des traditions religieuses. C'est pourquoi, en échange du paiement de la djizya, les musulmans ont protégé la vie et la propriété ainsi que les rites et les temples de leurs sujets non-musulmans.

En outre, les non-musulmans ont été reconnus comme des communautés distinctes avec leurs propres écoles et institutions. Les conditions qui ont permis un pluralisme religieux réussi ont été la justice et l'impartialité de l'autorité centrale et une discipline de non-provocation. Un esprit collectif de tolérance ne saurait être maintenu sans cette discipline. D'ailleurs, les musulmans tout comme les non-musulmans n'ont pas été autorisés à blasphémer, à se moquer et à rabaisser la croyance et les rites de chacun.
Ces disciplines et les sanctions dissuasives qu'elles entraînent ne constituent pas une coercition. L'islam applique également des sanctions dissuasives spécifiques aux musulmans afin de maintenir son ordre social et son esprit.

Clarifions ce point à l'aide d'une analogie. La plupart des États ont des forces armées composées de volontaires ou de conscrits. Ces deux catégories de soldats sont régies par la même discipline (et les mêmes sanctions). Il n'y a aucune « conscription » à l'islam, car vous ne pouvez y entrer qu'en prononçant la chahada.[19] Pour être valide et acceptable, cette déclaration doit être volontaire et sincère. Après quoi les devoirs et les obligations de l'islam s'appliquent pareillement à tous les musulmans.


Évidemment, le système et la discipline qui va avec ne sont pas extérieurs et ne sont pas aussi stricts que la discipline militaire l'est et doit l'être. Or il s'agit bien d'une discipline, et les infractions nécessitent des sanctions selon la gravité de l'erreur. Généralement, la discipline de l'islam s'acquiert graduellement. En raison de son caractère naturel inhérent et de sa facilité, et en particulier parce qu'elle repose sur des commandements Divins et non pas humains, elle est aisément adoptée et bien accueillie par le coeur.


Quand un sergent donne un ordre à ses soldats, ils s'empressent d'exécuter ce commandement qui est toujours extérieur – ils obéissent seulement parce qu'ils y sont obligés. En revanche, quand le dirigeant d'une prière en commun dit à voix haute Allahou Akbar !, chaque priant se donne le même ordre – qui est à la fois intérieur et extérieur. Ils obéissent parce qu'ils le veulent et qu'ils consentent à obéir, et ils sont heureux d'avoir à agir ainsi. La solidarité et la cohésion d'une assemblée de fidèles musulmans (comme le montrent la diversité et le rythme des mouvements de ses membres) représentent la solidarité des individus rassemblés par le désir de prendre part au même noble effort. Chacun accomplit son devoir un peu avant ou un peu après les autres, mais tout en restant toujours ensemble. Cela ne ressemble pas à la solidarité mécanique des soldats qui défilent vêtus du même uniforme.


La plupart des infractions à la discipline sont mineures, informelles et corrigées de façon informelle – habituellement par un musulman conseillant à un autre de faire ce qui convient et de cesser de faire le mal. L'islam considère la calomnie, l'exagération, et même raconter les défauts ou les péchés de quelqu'un comme des fautes graves. L'attitude recommandée qui est aussi généralement la plus pratiquée par la grande majorité des musulmans est la patience, le pardon, la tolérance envers autrui et la sévérité envers soi.
Cependant, certains types d'infractions menacent l'esprit social en général. Si l'on ne réagit pas face à de telles menaces, l'esprit social se dégradera et l'ordre général de la société et sa stabilité en seront affectés. Là où les efforts privés et informels pour corriger les infractions échouent ou deviennent inutiles, des mesures publiques et officielles, qui comprennent la force, doivent être prises. Par exemple, l'islam interdit la consommation des narcotiques, les jeux de hasard, l'adultère, la fornication, la fraude, le vol et autres pratiques nuisibles. Il les considère à la fois comme des péchés et des crimes qui méritent une punition. Si l'on permettait que ces vices prennent racine et se répandent, la société ne réussirait pas à accomplir son devoir envers la loi et l'esprit moral de l'islam.

Des mesures collectives doivent être prises pour empêcher ou arrêter la corruption répandue au sein du corps social. Tandis qu'une telle action inclut des efforts positifs pour inculquer les vertus nécessaires à la communauté, elle doit aussi accepter l'action négative telle que l'application de sanctions appropriées à ceux qui, volontairement et systématiquement, introduisent dans la société les vices qui détruiront sa discipline et son caractère islamique.
Considérons le cas de l'apostasie.


L'apostasie est jugée aussi grave par la loi islamique que la trahison par la plupart des États et toutes les forces armées. Il faut espérer empêcher un tel crime de devenir public et nuisible à la société grâce aux supplications, aux prières, à la persuasion et à tous les autres moyens légitimes. Ceux qui persistent à poursuivre ce chemin doivent être invités à reconsidérer la gravité de leurs actes et à se repentir. Et s'ils rejettent cette opportunité, la peine de mort s'impose. Aucun châtiment plus clément ne pourrait exprimer l'horreur de la société envers la violation du pacte avec Dieu. La chahada, par laquelle l'individu entre en islam, est une affaire très sérieuse. La repousser signifie insulter l'équilibre de la création et son rapport avec le Créateur.

Si l'apostasie était considérée uniquement comme une affaire individuelle, la conscience personnelle serait équivalente à rabaisser la religion à un jouet ou à un jeu littéraire – tantôt un plaisir ou une convenance, tantôt un mécontentement ou un ennui, selon le caprice du moment.


Il n'y a « nulle contrainte en religion » parce que nous avons le libre arbitre et parce que « la vérité est désormais distincte de l'erreur ». La vérité a une autorité absolue dans la conscience humaine, qui l'appelle instamment à affirmer son Créateur et son Pourvoyeur. Dans la vie individuelle et collective, l'autorité absolue de la vérité exige une discipline flexible mais forte et continue. La discipline et l'endurance, ainsi que la compréhension compatissante et la patience, sont les réponses qui conviennent à toutes les infractions – à condition que la discipline elle-même ne soit pas menacée de destruction. Comme chaque discipline, la discipline de l'islam impose ses charges. Mais à la différence de toute autre discipline, les récompenses pour avoir porté ces charges avec une dévotion sincère sont un esprit sain, la sérénité et l'aisance dans cette vie et dans la vie future.

F GULEN
 
Üst